Les labels ont pour mission de caractériser une éthique, mais ils sembleraient être avant tout des bons points que s'octroient les industriels afin de satisfaire les consommateurs soucieux de leur empreinte écologique. On pourrait penser que l'industriel du XXIème siècle est devenu responsable et consciencieux, seulement, il y a deux façons d'obtenir des bons points, oeuvrer ou tricher. Les informations ne manquent plus et ne sont pas toutes manipulées, nombreuses d'entre elles témoignent que nous vivons dans un monde de tricheurs, mais aussi dans un monde qui repose sur la confiance.
Les lobbies certifient prendre soin de notre santé et de notre environnement, seulement être citoyen responsable, c'est avant tout boycotter la promotion des valeurs occidentales. Prenons conscience, informons-nous, fouillons la toile, communiquons, des solutions autres qu'industrielles existent pour diminuer notre empreinte écologique (une petite piqûre de rappel pour les amateurs de bois exotiques : une alternative au Teck). Le développement durable ne peut se concevoir par la certification industrielle d'une consommation croissante mais par la prise de conscience de chacun et l'éducation.
Voici un excellent texte de Fabrice Nicolino "A DIFFUSER SANS MODÉRATION DANS TOUS LES RÉSEAUX" traitant du label PEFC, qui nous rappelle que "tout n’est que commercial et industriel".
Les amitiés particulières de France Nature Environnement (Acte 4)
A propos de la forêt dans le monde (un scandale authentique)
‹‹ Donc, France Nature Environnement (FNE) copine avec l’industrie du bois de manière à octroyer un label commercial, en France, aux monocultures de pins et de Douglas (voir l’article précédent). C’est lamentable, assurément, mais cela ne touche pas aux joyaux de notre Couronne planétaire. Au moins, du moins, les forêts tropicales et boréales ne sont pas concernées. Sauf que si. Elles le sont. Exactement de la même manière. Ou plutôt d’une façon beaucoup plus grave, avec la pleine, entière et consciente coopération de quelques responsables de FNE. Car ils sont au courant, pour l’essentiel, depuis longtemps. Comme je ne sais l’expliquer vraiment, je me contenterai provisoirement de dire qu’ils ont perdu la tête. Mais voici l’histoire.
Le label PEFC est international. Il délivre aussi des certificats de bonne conduite pour les forêts boréales et tropicales. Et cela donne des résultats inouïs. Avant de détailler, je dois nommer une fois encore Sébastien Genest, le président de FNE. Je ne lui cherche pas noise, je lui demande seulement d’assumer publiquement ses positions publiques. Et en voici une, de taille.
C’est lui - il est forestier - qui a poussé FNE à soutenir le label PEFC. Et il est aujourd’hui membre de son bureau international (ici). Regardez donc ces têtes satisfaites d’elles-mêmes, et ces titres ! Chairman, Vice Chairman, Board Member. Oh, il n’y a pas besoin de longues études pour comprendre comment marche un tel système. Quoi qu’il en soit, Sébastien Genest est au bureau international, où il sert de caution mondiale à un label qui se situe pourtant aux antipodes de l’écologie. Et il est le seul ! Le SEUL ! Aucune autre association écologiste n’a osé apposer son nom au bas des tracts PEFC, ce qui est tout de même rassurant. Mais aussi très inquiétant. Au nom de quoi FNE, qui ne dispose d’aucune expertise, d’aucun relais, d’aucun engagement dans les pays-clés de la biodiversité, ose-t-elle parler au nom de tous ? Au nom de quoi ose-t-elle prétendre que le label PEFC est bon dans les lointaines contrées boréales et tropicales ? Ce serait farce, en d’autres circonstances.
Aux États-Unis, un autre label existe depuis des lustres, American Tree Farm System (ATFS). Comme il a le même but que PEFC - vendre du bois -, il était logique que les deux s’épaulent. De rapprochement en rapprochement, un accord est conclu en 2007, mais qui doit être avalisé par un audit rigoureux. Pensez, ces gens sont sérieux. Or donc, PEFC donne mission à un organisme indépendant, ITS, basé en Australie, de certifier le certificateur qu’est ATFS. Le choses deviennent alors passionnantes.
Car il s’agit d’une rencontre entre deux adversaires assumés de l’écologie. ATFS, le label américain, est de son côté sponsorisé par le géant de l’agochimie BASF ! Si vous voulez souffrir, allez voir comment les deux larrons accordent des récompenses ensemble (ici). C’est simplement effarant. Et quant à l’organisme indépendant censé garantir l’engagement d’ATFS, il s’agit de la société International Trade Strategies Pty Ltd, dont le propriétaire s’appelle Alan Oxley (ici).
Oxley ! Nous n’habitons pas en Australie, et c’est dommage, car cet homme y est connu là-bas pour ce qu’il est. Je vous résume. Oxley a été l’ambassadeur de l’Australie aux négociations du Gatt - l’ancêtre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) - il y a plus d’une vingtaine d’années. Peu d’hommes de son pays auront fait davantage pour la mondialisation de l’économie, synonyme de destruction de la vie. Vraiment peu. Mais il faut ajouter qu’Oxley est un lobbyiste acharné au service de l’industrie transnationale et qu’il est éditorialiste d’un site internet très marqué à droite, TCS Daily (ici). J’ajoute que lorsqu’Oxley a commencé à y écrire, ce site était soutenu, entre autres, par l’entreprise pétrolière Exxon Mobil.
Et c’est logique, terriblement logique, car Oxley a été au cœur des manœuvres pour retarder la prise de conscience du dérèglement climatique en cours. Selon des sources dignes de foi, il ferait partie d’un groupe qui a tenté et tente probablement encore d’influencer les journaux et les décideurs en faveur du scepticisme climatique. En somme, il serait un Claude Allègre, rémunéré pour ses services, à la différence de l’autre.
Dans ces conditions, M. Oxley était-il l’homme désigné pour certifier que le bois labellisé ATFS est durable ? C’est en tout cas ce qu’il a fait. Le 7 août 2008, le label ami de BASF, adoubé par le lobbyiste Oxley, entrait dans la grande famille PEFC, sous les applaudissements du bureau international dont fait partie Sébastien Genest, président de FNE.
Dingue ? Je vous laisse le soin de juger. Et m’apprête à clore cet éprouvant chapitre par un événement bien plus inouï encore. La Tasmanie, île proche de l’Australie, compte quelques forêts primaires parmi les plus belles du monde. Des arbres hauts de plus de 100 mètres et vieux de quatre siècles protègent un monde auquel nous devons tout. Le dernier des écologistes devrait être prêt à l’action la plus vive pour les préserver.
Des entreprises forestières se sont pourtant attaquées, ces dernières années, à cet héritage sacré. Après tronçonnage des arbres-cathédrales, passage d’hélicos et largage de napalm - comme au Vietnam - pour cramer les souches et laisser la place à des plantations d’eucalyptus à croissance rapide. Comme avec les Douglas du Morvan, napalm en moins. Pour que les bestioles qui auraient survécu ne puissent boulotter les tendres pousses d’eucalyptus, du poison neurotoxique a comme de juste été épandu autour des plants. Le tout pour fabriquer du papier. Du papier à chiottes, par exemple.
Et ce saccage dégueulasse a reçu le label PEFC. Oui. D’après The Wilderness Society, plus de 140 000 hectares de forêts primaires de Tasmanie auraient été convertis en plantations depuis 1997. Mais cette manière de tout détruire serait durable ! En Australie, l’affaire a fait un raffut du diable, à l’initiative de nombreuses véritables associations écologistes Si vous voulez en savoir plus, reportez-vous au copieux dossier réuni par les Amis de la Terre, impeccable en la circonstance (ici). Le gouvernement australien a promis 50 000 dollars pour aider PEFC à contrer la campagne écologiste de protestation. L’ambassade australienne à Paris assure que l’argent n’a pas été versé. Dans tous les cas, se rend-on bien compte, ici, de ce que cela signifie ?
Depuis 2007, la conversion des forêts primaires aurait pris fin, du moins à grande échelle. Car les coupes rases de forêts primaires continuent, suivies de « nettoyage » au napalm. La conversion en eucalyptus serait limitée à des blocs de dix hectares, lesquels peuvent évidemment, quand on les additionne, représenter des surfaces géantes. Le label PEFC ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Non pas. Le prochain objectif est d’une importance majeure, car il s’agit de la Malaisie, pays d’Asie du sud-est où subsistent, dans la partie malaisienne de Bornéo, d’exceptionnelles forêts primaires.
Mais il y a - elle n’est pas la seule, de loin ! - la compagnie Samling Global Limited, fondée en 1963 en Malaisie. Enregistrée aux Bermudes, son chiffre d’affaires approchait 400 millions de dollars en 2006. Elle exploite des concessions forestières en Malaisie, au Guyana - Amérique du Sud - et en Nouvelle-Zélande, sur environ 4 millions d’hectares. Comme je n’écris pas un livre, je ne peux détailler ici tous les conflits déclenchés cette compagnie avec les populations locales. Au Sarawak, les Penan chers au cœur du Suisse Bruno Manser - disparu dans de troubles circonstances - se battent contre la Samling depuis des décennies.
Un autre peuple de Bornéo, les Kenyah, sont mobilisés en ce moment même contre la compagnie. L’an passé, les Kenyah ont dressé des barricades pour empêcher les camions de la Samling d’emporter des arbres de leur forêt du haut Sungai Sebua, du Sungai Jekitan et du Sungai Moh. Sur leurs dérisoires pancartes, on pouvait lire : « Samling, ne volez pas les richesses des terres des pauvres pour les donner aux riches de la ville ».
Je pense que cela suffit comme cela. La Samling est donc dirigée par de très braves gens. Lesquels ont obtenu en 2005 une certification forestière appelée Malaysian Timber Council Certification (MTTC, ou Conseil malaisien de certification du bois). Exactement comme les Américains d’ATFS. Restait, et reste au moment où j’écris, à réussir la dernière partie de l’opération, qui consiste à faire reconnaître le label malaisien MTTC par PEFC, ce joli machin cautionné par Sébastien Genest et FNE.
Car, je vous le rappelle, tout n’est que commercial et industriel. Si vous avez le label PEFC sur votre bois, fût-il celui des Kenyah, il pourra être vendu dans le monde entier. Et sinon, vous devrez trouver une autre combine. En ce début du mois de mars 2009, où en sommes-nous ? Selon mes informations, l’affaire avance à grand pas. Un processus de reconnaissance du label malaisien MTCC par PEFC est en cours. Au terme de ce « travail » (ici), la Samling devrait donc pouvoir disposer du sésame sur toutes ses grumes, le mot qui ouvre tous les marchés, PEFC. Bien entendu, toutes les associations écologistes malaisiennes dénoncent cette imposture. Mais que sont-elles, face à la clairvoyance de FNE ?
Oh, j’allais oublier. France Nature Environnement a bien de la chance. Oui, bien de la chance. Car dans la discrétion qui sied à ce genre de pratiques, le ministère de l’Agriculture français prend en charge le salaire de certains de ses chargés de mission. Au moins d’un, qui occupe une partie de ses journées à travailler sur le cas malais.
Dans ces conditions, je me permets de proposer à Sébastien Genest un débat contradictoire. Où il voudra. Quand il voudra. De la manière qui lui conviendra le mieux. Je ne poserai qu’une condition : venir accompagné de deux témoins. Et je suggère que nous discutions sans agressivité ni complaisance de cette certification PEFC. Moi en tout cas, je n’ai rien à redouter. Et l’enjeu concerne la totalité du mouvement écologiste. FNE, à mes yeux, doit se reprendre et quitter le bureau international de PEFC. Nous devons, tous ensemble, empêcher la certification en cours de l’entreprise Samling. Pour commencer. Pour recommencer. ››
Acte 3 - A propos de la forêt en France
La fin de la déforestation en Tasmanie ? Effet d’annonce et complicité de PEFC
Le label FSC, certification ou manipulation ?
Le Mouvement Mondial pour les Forêts Tropicales, qui soutenait auparavant le FSC (Bulletin du WRM Nº103 - Février 2006), semble avoir revu sa position.
‹‹ Le FSC (Forest Stewardship Council) a encore aggravé les problèmes que provoquent les plantations d’arbres en régime de monoculture en certifiant nombre des plus mauvaises comme ‘forêts gérées de façon responsable’. Bien qu’il existe de nombreuses preuves des problèmes qui entourent la certification de plantations, Greenpeace et le WWF - entre autres - continuent de soutenir et d’approuver le FSC, de sorte que la plupart des nouvelles plantations sont justifiées par le fait que d’autres semblables ont déjà été certifiées comme ‘durables’ par le FSC. Cela comporte aussi des implications graves en ce qui concerne l’expansion des plantations destinées aux agrocarburants, parce que les prétendus ‘critères de durabilité’ qui permettent de certifier les agrocarburants sont en train de provoquer l’accaparement de terres en Afrique.›› Bulletin du WRM Nº133 - Août 2008
Dans son Bulletin Nº134 (FSC : arrêtez de certifier les plantations d’arbres en régime de monoculture !), le WRM dénonce les conditions de travail proches de l'esclavage dans des plantations certifiées par le FSC en Uruguay. Elle dénonce également le défrichement de 80 hectares de forêt indigène strictement protégée.
‹‹En Irlande, l’entreprise Coillte possède près de 450 000 hectares de plantations d’arbres gorgées de pesticides. Après une inspection faite en 2007, l’organe qui vérifie que les normes du FSC soient respectées, Accreditation Services International (ASI), a constaté que « la non-conformité avec les critères du FSC va probablement se maintenir pendant quelques années encore ». Néanmoins, Coillte est toujours en possession du certificat FSC.››
‹‹En fait, le FSC encourage activement les plantations industrielles d’arbres lorsqu’il essaie d’augmenter les ventes de papier FSC. Son « Forum mondial sur le papier » réunit plusieurs centaines de représentants de l’industrie papetière pour trouver « des opportunités commerciales pour le papier au label FSC ». Cette année, le forum était sponsorisé par Mondi et Suzano, entre autres. L’Assemblée générale du FSC, qui se tiendra en Afrique du Sud en novembre, est parrainée par Mondi, Tembec et Sveaskog. Le FSC devrait se distancier d’urgence de l’industrie qu’elle certifie. Or, elle s’en rapproche. De ce fait, son logo se réduit de plus en plus à une étiquette écolo pour les entreprises.››
Quelques liens en anglais :
FSC and Big Green "Certified" Ancient Forest Logging Tragedy Worsens
Stop the Forest Liars: "Certified" Old-Growth Rainforest Logging
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LES AMIS DE LA TERRE DENONCENT LE LABEL PEFC AUPRES DE LA DGCCRF
Retrouvez le documentaire « PEFC : le label qui cache la forêt » : http://www.amisdelaterre.org/Les-Amis-de-la-Terre-denoncent-le.html
Créé en 1999 par l’industrie du bois, le label PEFC est aujourd’hui présent sur de nombreux produits de consommation courante : magazines, meubles en bois, emballages papier ou encore papier hygiénique.
Alors qu’il est censé « promouvoir une gestion durable des forêts », un documentaire qui a pour cadre les forêts du plateau de Millevaches en Limousin, révèle l’imposture en montrant comment des pratiques peu scrupuleuses en matière d’environnement sont « éco-certifiées » par PEFC.
Les Amis de la Terre, qui ont participé à cette enquête, ont décidé, avec deux autres fédérations d’associations locales, de saisir la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) en estimant que ce label était de nature à tromper le consommateur.
Sylvain Angerand, chargé de campagne pour la protection des forêts aux Amis de la Terre France explique : « Le label PEFC est devenu incontournable dans les magasins et trompe de nombreux consommateurs qui croient acheter un produit écologique ; c’est pour cela que nous avons décidé de saisir la DGCCRF. »
Il est sûr qu'un label délivré sans contrôle adapté et régulier ne peut être crédible. Malheureusement, depuis 10 ans, la plupart des forêts françaises sont labellisées... et la label « s'internationalise » rapidement !
A visionner...
Durablement,
Cyril Hergott
Directeur du développement
www.riposteverte.com
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